Le Luron

Autant Coluche continue d'être célébré en tant qu'apôtre franciscain des Restos du Coeur, autant Thierry Le Luron paraît aujourd'hui bien oublié. Pourtant, ces deux-là qui avaient convolé en justes noces devant le Tout-Paris, étaient partis pour suivre le même itinéraire posthume. Un coup à gauche, un coup à droite, l'humour au centre. Unis pour le meilleur et pour le rire dans une même fraternité, celle de l'humour vache. Alors pourquoi des chemins posthumes aussi dissemblables ? Sans doute parce que Le Luron n'a rien proposé d'autre que des imitations et que s'il est un genre qui se démode facilement, c'est bien celui-là. Le portraituré disparaît en même temps que le peintre, l'original en même temps que le carbone. Qui se fout aujourd'hui d'Alice Sapritch, Dalida ou Georges Marchais que le gentil Le Luron s'est amusé à caricaturer ? Tout le monde les a oubliés, si ce n'est quelques ringards égarés ou de friands lecteurs de Télé 7 Jours. Et encore, s'il l'on avait décelé la moindre parcelle de provocation, on aurait pu sauver l'humoriste des limbes. Mais il paraît évident qu'à l'époque même où il singeait des stars de pacotille, la subversion de Le Luron semblait aussi ringarde que la gousse de ma grand-mère, lorsqu'on sait ce que Charlie Hebdo ou Hara-Kiri étaient capables de faire à la même période. Il n'y avait bien que Bouvard pour croire que les gentilles saillies du jeune comique bousculaient un tant soit peu l'ordre établi.

 Finalement, que reste-t-il de Le Luron aujourd'hui ? Sans doute le privilège d'avoir été un des premiers à populariser l'art de l'imitation en lui donnant sa fenêtre télévisuelle à partir de 1969, démodant en cela l'unique corde qu'Henri Tisot avait à son arc et... le fit se faire moine. A telle enseigne qu'une poignée d'imitations plus tard, les avatars du petit Le Luron optèrent pour le doublage de créatures en latex, afin de ne pas sombrer dans la ringardise et les caveaux de la république.

Comments

[Djemaa]

Merci pour cet article...C'est vrai. Pascal.