RIP

Souvenons-nous : 1980. Au sortir du Collège de France, une camionnette et c'est l'accident. La France perd un de ses plus grands intellectuels. Sémiologue, empereur des signes, chasseur de mythes... le décès de Roland Barthes éclipse celui de Jean-Paul Sartre, qui était depuis longtemps tombé dans l'anonymat.

Dans les rues parisiennes, tee-shirts, badges, drapeaux se vendent comme des petits pains. Les chaines de télévision interrompent leur programme pour des hommages parfois un peu convenus, mais ô combien sincères. Les journaux titrent sur la perte d'un penseur d'exception. Sur les toits des mairies, les drapeaux sont en berne. Et puis, comme une vague, la "barthemania" déferle à nouveau sur le monde.

"C'est affreux, il venait se signer un de ses plus grands livres avec La chambre claire" sanglote Kimberley, une étudiante en poterie à Lexington (Kentucky).

"La connotation et la dénotation sont orphelines" déclare gravement le président américain Jimmy Carter.

L'enterrement sera grandiose. Le cercueil de Roland Barthes porté par Claude Lévi-Strauss, Michel Foucault et Jacques Lacan arpentera les rues de la capitale, avant d'élire demeure au Panthéon de la Sémiologie. Barthes y reposera à jamais au côté de Saussure, le maître.

Aujourd'hui, on peut considérer que la mort de Michael Jackson n'a pas la couverture médiatique qu'elle mérite. Si l'on considère, de manière un peu incongrue je vous l'accorde, que celle de Roland Barthes a laissé des millions de fans orphelins à travers le monde, on peut s'interroger sur la façon dont l'opinion publique traite les artistes. Certes, Roland Barthes avait du talent, mais Michael Jackson a popularisé le "moonwalk". A côté, Barthes semblait un peu raide et emprunté. Et puis Barthes n'avait pas quitté sa mère, alors que Jackson avait franchi le pas en achetant "Neverland".

Cet après-midi, un hommage sera rendu au chanteur américain. Rappelons-nous que rien ne vaut l'émotion, surtout lorsqu'elle planétaire...