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Le blog du touilleur
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21 avril 2014

D'ane à zèbre (2014)

 

D’âne à zèbre. Lettre H.

humour

L’humour, défini comme une« hyperacuité au réel », ne pouvait échapper à l’auteur. On le sait prolixe sur le sujet. On ne le soupçonnera pas d’en manquer lui-même. Synthèse des deux énoncés précédents : François Bégaudeau écrit un chapitre à la fois drôle et analytique. Sujet maudit, pourtant. C’est quasi automatique : ceux qui en parlent deviennent volontiers sinistres. Quand Bergson analyse le rire, on se marre très peu. Quand Genette se plie à l’exercice dans Figures V, on reconnaît Genette. Et quand Pagnol nous apprend que la source du rire est dans celui qui rit, on a l’impression que la source cache Ugolin.

Tous ces auteurs ont oublié d’incarner le phénomène. L'écrivain choisit Patrick. Kuback. Trois blagues à la seconde, forcément du déchet. Surtout l’immense envie de tenter la plaisanterie. On ne sait si la faculté d’être drôle s’est construite sur la répétition des effets comiques. En tous cas, pour Eric, c’est le signe de, puisqu’avec lui, il n’y a que des signes. De quoi ? Du désespoir, forcément. Mais le corps d’Eric n’est pas celui de Patrick. Et Patrick n’est pas Bigard, chez qui l’auto-justification a motivé l’écriture d’un livre au titre éloquent : Rire pour ne pas mourir. Syndrome du rigolo en quête de respectabilité. Qui aurait dû quitter ses fonctions après la sortie du bouquin.

« Pourquoi avez-vous fait comique ? – Parce qu’au fond de moi, il ne vaut mieux pas promener sa lanterne… ». Question subsidiaire des journalistes : « Depuis quand ? Vous faisiez déjà rire vos petits camarades à l’école ? ». On le sait : le comique traditionnel ne souffre pas du vertige. Très tôt, il monte sur les tables de classe. Après, sur scène. Sa hauteur de vue force le respect. A ces interrogations rituelles, Desproges donnait une réponse assez intéressante : « Je n’ai pas fait rire tant que je n’ai pas été payé pour. ».

Jamais on n’apprendra que Patrick était un surdoué. Ce n’est pas la genèse du corps comique qui intéresse François Bégaudeau, mais sa manifestation dans l’ici, le maintenant. Ce corps, réfractaire aux situations solennelles, ne s’interdit pas la dérision. Il aurait sûrement fait « Cui cui » sur les ondes de la BBC, s’il avait été De Gaulle.

C’est parce que cette puissante machine à produire de l’humour le passionne que l'auteur nous propose un morceau de bravoure qui vaut tous les traités sur la question : la naissance d’une vanne, très promptement verbalisée, et même à une vitesse prodigieuse quand on voit à quels processus intermédiaires cette blague est soumise.

Franchement, le ralenti a quelque chose de vertigineux.

Conclusion implacable : la rapidité constitue la quintessence de l’humour. On le savait finalement : les plus drôles ont le sens de la répartie. Mais encore faut-il que la répartie soit drôle. Pour un Jamel, combien de Ruquier sur Terre…

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